Un article de Thierry Le Peut
publié dans Arrêt sur Séries n°26 (octobre 2006 - épuisé)
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Un Anglais, deux Américains
ou Comment créer un cocktail détonant
en deux séries
« Nous étions au terme du tournage du Saint et l’idée d’ Amicalement Vôtre me trottait dans la tête depuis déjà pas mal de temps. J’ai alors eu l’idée d’écrire une histoire, pour Le Saint, qui mettrait en scène Roger Moore et un Américain, un Texan milliardaire, et qui fut, en fait, un brouillon de ce qui allait devenir Amicalement Vôtre. »
Robert S. Baker in Génération Séries n°5, hiver 1993, p. 35.
Du Saint à Amicalement Vôtre, il n’y a que la distance d’une idée à une autre, autant dire un saut de puce, mesuré en quantité d’électricité. Alors que Le Saint, désormais tourné en couleur pour être plus facilement vendu aux Etats-Unis, touchait au terme de sa carrière télévisuelle – provisoirement -, « Le roi » [« The Ex-King of Diamonds »] fut cet épisode commandé par Baker, producteur de la série, qui permettrait de tester sur le public la viabilité de son idée : un Anglais, un Américain, voilà qui, mis ensemble, devait constituer le cocktail original susceptible de fournir le gimmick d’une série d’action à même de séduire le public anglo-saxon des deux côtés de l’Atlantique. La base de ce cocktail : la relation amour-haine du Nouveau Monde et du Vieux Continent, stigmatisé par les usages surannés et aristocratiques de la Blanche Albion. Monarchie et indépendance, respect des traditions et irrévérence pionnière, flamboyance historique et jeunesse fondatrice d’un self made country, c’est tout cela et bien plus qui s’exprime dans cette opposition dont joueront d’autres séries plus tard, aux titres de Magnum P.I. ou de Dempsey and Makepeace. Pour l’heure, il est clair dans la tête de Baker que l’Anglais ne peut avoir les traits que de Roger Moore, qui symbolise à lui seul la pénétration du « modèle » anglais dans le monde (Le Saint est l’une des séries britanniques les mieux vendues, fleuron du commerce extérieur de la nation !) ; quant à l’Américain, ce sera un avatar de Rock Hudson, un cow-boy dont l’allure suffira à évoquer l’immortel Géant du cinéma. Le type même du « nouveau riche », arrogant et m’as-tu-vu, aux antipodes de la retenue aristocratique d’un sujet de Sa Très Gracieuse Majesté.
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« Le roi » est diffusé en janvier 1969, trois semaines avant la fin de la cinquième et ultime saison du Saint. Pour l’écrire, Baker s’est adressé à l’un des scénaristes fidèles de la série, celui qui retint les suffrages de Leslie Charteris lui-même, John Kruse (pour mémoire, rappelons que Charteris n’était pas tendre avec les scénaristes de la série, et spécialement avec Harry Junkin, en charge de la direction d’écriture du premier au dernier épisode). Kruse sera aussi l’un des artisans majeurs du Retour du Saint en 1978 et le scénariste de Roger Moore pour Crossplot (Double jeu), un film d’action que l’acteur produit en 1969, juste après l’arrêt du Saint, pour tenter de percer au cinéma (le film, réalisé comme « Le roi » par Alvin Rakoff, sera un échec commercial). Le bonhomme écrit depuis les années cinquante, essentiellement pour la télévision où il a collaboré aux programmes William Tell (1958), Knight Errand Limited (1959), Adventures in Paradise (1961), The Avengers (1961), Top Secret (1961), The Third Man (1959) et quelques autres. Ecrivain intelligent et capable de restituer à l’écran l’ingéniosité et l’énergie des aventures littéraires du Saint, selon Charteris, Kruse reçut pour mission d’écrire un traitement qui donnerait au personnage de l’Américain une présence pratiquement égale à celle du héros en titre : une exigence qui permettrait d’apprécier la valeur potentielle du cocktail et qui suffit à rendre atypique cet épisode du Saint, Simon Templar étant habitué aux faire-valoir féminins mais bien peu accoutumé en revanche au fonctionnement en tandem. Templar, héros anglo-américain par excellence, n’a certes pas l’affectation (d’aucuns diront la morgue) aristocratique de son futur cousin Brett Sinclair, et l’opposition entre l’Anglais et l’Américain est forcément moindre dans « Le roi » ; mais il possède l’élégance et, disons le mot, le flegme qui en font le porte-drapeau d’une certaine tradition gentle du vieux continent. Cynique et toujours prompt à démasquer l’esprit de sérieux, il n’a rien de l’arrogance du « parvenu » ; s’il profite d’une fortune dont la série ne dit jamais comment il l’a acquise (ou l’acquiert – rappelons que les romans et nouvelles de Charteris, eux, ne se privaient pas de lever le voile sur cet aspect du personnage), on ne peut certes pas lui reprocher d’en faire étalage. C’est donc sur une opposition de caractères autant que de comportement que devait reposer le scénario de Kruse : l’Américain est aussi exubérant et expansif que Templar est discret et retenu, tant dans l’étalage de sa richesse acquise dans la poussière crasse des puits de pétrole que dans son attitude excentrique et provocante.
L’acteur choisi pour donner vie à l’Américain de « Le roi » était lui-mêrme américain, bien qu’il se fût déjà produit à la télévision britannique. Stuart Damon est né en effet à New York en 1937 (soit dix ans après Roger Moore) et apparu dans un épisode de Man in a Suitcase (L’homme à la valise) en 1967 (« Man from the Dead »). Après son rôle dans « Le roi », il est recruté pour faire partie de la distribution régulière d’une nouvelle série anglaise, Les Champions, avec deux comédiens anglais apparus dans Le Saint, Alexandra Bastedo et William Gaunt. Rien de surprenant puisqu’il s’agit, comme Le Saint, d’une production ITC. La série vivra une trentaine d’épisodes mais Damon, sur sa lancée, continue alors de jouer dans des séries pour la télévision britannique : il est dans UFO en 1971, dans L’Aventurier en 1972 et 1973 (il joue deux fois le même personnage), dans Les aventures de Prince Noir, en 1973 également, puis dans un épisode de Thriller en 1976, Cosmos 1999 la même année et The New Avengers (Chapeau melon et bottes de cuir époque Purdey et Gambit) en 1977. Le temps est alors venu pour lui de retourner à son pays d’origine : on le voit donc dans L’Ile fantastique en 1982 et 1983, dans Hotel en 1985, dans Mike Hammer en 1987 et un épisode de Perry Mason en 1993, puis dans Diagnosis Murder (Mort Suspecte) en 1997 et des soap operas, Port Charles puis General Hospital.
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Les motifs dont se sert Kruse dans « Le roi » seront repris par Brian Clemens pour écrire l’épisode-pilote d’Amicalement Vôtre, au point que certaines scènes du premier sont la matrice évidente de quelques-uns des moments « cultes » d’« Overture » [« Premier contact »], la première aventure de Brett Sinclair et Danny Wilde. La course de voitures qui oppose les deux protagonistes dans le premier acte des deux épisodes en est l’exemple manifeste mais est loin de constituer l’unique point commun entre « Le roi » et « Premier contact ».
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Le cadre des deux aventures est le même : tout commence à l’aéroport de Nice-Côte d’Azur et se poursuit à Monte Carlo après une parenthèse sur les routes qui conduisent de l’un à l’autre. La différence est essentiellement que « Le roi » n’a pas été tourné réellement sur la Côte d’Azur, au contraire du premier épisode d’Amicalement Vôtre ; différence immédiatement visible à l’image, ne serait-ce qu’en raison de la mise en scène combien plus dynamique de la course, séquence de près de trois minutes dans « Premier contact », au cours de laquelle la Ferrari et l’Aston Martin traversent des paysages authentiquement français. Si « Le roi » se déroule en grande partie dans le décor d’un casino, autour d’une table de jeu, « Premier contact » met à profit les extérieurs et élargit la palette des lieux visités. Il en résulte un clinquant évident dans la seconde aventure, alors que la première est, comme la plupart des épisodes du Saint, essentiellement tournée en studios. En dépit de cette différence de forme, le scénario de « Premier contact » use d’une alternance de lieux analogue à celle de « Le roi » : en particulier, le dernier acte se déroule dans des méandres souterrains, sous-sols d’une entreprise dans Le Saint et d’un vignoble dans Amicalement Vôtre.
On remarquera que la distribution présente plus que des points communs d’un épisode à l’autre : au couple formé par le Professeur Flambeau et sa fille dans « Le roi » répond le couple Fulton-Maria dans « Premier contact », même si ce dernier n’est jamais réuni ni lié par aucun lien de parenté ; Flambeau et Fulton partagent d’ailleurs une certaine ressemblance physique, d’âge et de corpulence. Dans les deux cas, le tandem anglo-américain commence par se rencontrer fortuitement et se jauger au cours d’affrontements bon enfant, avant de conjuguer ses efforts pour, comme le dit le script de « Le roi », « jouer aux détectives » ; dans le premier cas, il s’agit de tirer au clair une fraude dont ont été victimes les deux protagonistes, dans le second de remplir une mission assignée par le juge Fulton afin d’éviter une peine de prison. Au motif de la fraude dans Le Saint répond celui du guet-apens dans Amicalement Vôtre, tendu non par les « méchants » mais par le troisième protagoniste qu’est le juge Fulton. Fruit des circonstances et du hasard dans Le Saint, la collaboration des héros est provoquée délibérément dans Amicalement Vôtre : de l’un à l’autre, c’est la conscience assumée de la partie à jouer qui s’affirme ; il n’est plus question dans « Premier contact » de conter une rencontre fortuite mais de mettre en scène une formule qui a déjà fonctionné, dans « Le roi », et que l’on renouvelle à dessein. Aussi la séquence prégénérique de « Premier contact » (le teaser, séquence liminaire ayant pour but d’« appâter » le spectateur en exposant la situation sans en révéler les tenants et les aboutissants) explicite-t-elle la métaphore chimique : il s’agit bien, dans l’esprit du juge Fulton, de provoquer la rencontre de deux éléments inoffensifs en soi mais explosifs une fois réunis. « Prenez deux produits relativement peu dangereux. Disons du nitrate et de la glycérine. Mêlez ces produits et vous allez obtenir une combinaison explosive. » (Le juge dixit.) Cette métaphore, c’est l’explicitation du projet scénaristique de l’épisode et de la série tout entière, projet déjà testé dans « Le roi » et dont on connaît donc le potentiel. On peut dire que la rencontre est planifiée d’avance, autrement dit que le hasard n’a plus de rôle à y jouer : la conscience agissante du juge Fulton est en même temps celle du scénariste et des producteurs.
L’archétype est l’un des composants essentiels des deux scénarii. Dans « Le roi », il confine à la caricature : afin de souligner l’opposition entre les protagonistes et d’en faire un ressort comique, Kruse caractérise son Américain à l’aide de poncifs qui en font une image d’Epinal plutôt qu’un personnage à part entière. C’est clairement le gimmick qui domine l’épisode, non la personnalité de l’Américain. Le choix du Texas comme patrie du personnage est évidemment significatif ; il permet de donner vie à l’archétype du pétrolier comme symbole de la réussite à l’américaine. Coiffé d’un Stetson et vêtu tout entier comme un cow-boy moderne – version élégante bien entendu -, amateur de cigare, un foulard noué « à la John Wayne » autour du cou, Rod Huston emprunte de plus son patronyme (à une lettre près) à une ville qui est elle-même un symbole de cet archétype. Pour appuyer l’effet, Kruse fait dire à l’un des personnages que Houston est le nom d’une ville, pas d’une personne. En sus, R. H. sont les initiales de Rock Hudson, le héros de Géant, film-symbole, une fois de plus, de la richesse acquise dans le pétrole, vitrine d’une certaine Amérique. Cette Amérique étant l’Amérique de l’arrogance capitaliste, Huston est effectivement arrogant, jusqu’au ridicule, et jette les billets comme des confettis à une fête de patronage. Il évoque lui-même sa fortune sans complexe et saisit toutes les occasions de souligner qu’il a de quoi perdre, que ce soit à une table de jeu ou en paris stupides. Le Saint se fait un devoir de souligner, à son tour, combien la personnalité de l’Américain est puérile, ce qui achève de donner forme à l’archétype qu’utilisera plus tard Magnum, faisant de son Anglais un pince-sans-rire droit comme un piquet et de son Américain un grand enfant qui refuse de grandir. La personnalité du Texan entre ainsi en opposition avec celle du Saint, tout en retenue et en dignité, et l’opposition passe par l’humour : lorsque Huston évoque sa piscine privée, Templar s’empresse de répondre que « ce doit être le Golfe du Mexique », stigmatisant la folie des grandeurs et l’arrogance impertinente de l’Américain. Le goût de la provocation et le rejet extravagant des convenances aristocratiques est un autre aspect du Texan, illustré en l’occurrence par la place qu’il occupe dans sa voiture : c’est lui qui tient le volant… tandis que son chauffeur paresse à l’arrière (photo page précédente, en bas). Une image que l’on retrouve dix ans plus tard dans Pour l’amour du risque, avec son personnage de chauffeur-majordome plus ami de ses patrons qu’employé, mais qui avait déjà cours dans l’imaginaire américain, et anglais.
Tenue vestimentaire et attitude servent à opposer les protagonistes jusque dans le casino, où ils portent pourtant tous deux le smoking blanc. L’élégance caractérise le Saint, avec la veste boutonnée et le nœud correctement noué, tandis que l’Américain se signale par la veste ouverte et le nœud défait (photo ci-dessus). Autant le premier est calme et à son aise avec les conventions, autant le second est sur la défensive, prêt à en découdre et indifférent au protocole : il s’installe à la table du roi sous l’œil choqué des autres joueurs qui attendent, eux, que le roi se soit assis le premier. Raison pour laquelle, sans doute, le Saint ne se précipite pas dans le salon privé dès l’ouverture mais attend que tous soient assis pour rejoindre la table, saluant courtoisement le monarque. Au cours de la partie, l’Américain mâchouille son cigare et garde les mains posées en face de lui, comme prêt à la lutte, tandis que l’Anglais les garde croisées, suivant sereinement les péripéties de la partie (photo page précédente). Signe de son ignorance ou de son mépris du protocole, le Texan traite d’homme à homme avec le roi sans se soucier de son rang : à la fin de la partie, il prend rendez-vous pour la revanche du lendemain en adressant à Son Altesse un signe de la main imitant une arme à feu, comme un cow-boy du siècle précédent lançant un défi à son adversaire (photo ci-contre) ; plus tard, apprenant par le Saint que le roi a triché, il est prêt à courir le boxer séance tenante et n’est retenu que par Templar qui sait bien, lui, qu’un tel geste le mènerait droit en prison.
Bref, dans cette opposition des caractères, le Saint est fidèle à lui-même et ne se départit jamais de ce flegme qu’il sait porter même dans l’adversité ; le Texan, au contraire, est d’une fidélité constante à l’archétype qu’il représente. Il s’agit bien ici de mettre en contraste deux cultures, l’une plus posée parce que fille d’une longue Histoire, l’autre emportée et arrogante comme peut l’être une nation jeune.
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Le Saint est une série à héros unique, dont « Le roi » modifie légèrement la formule : la « pièce rapportée » (l’Américain) y joue une part inhabituellement importante mais le héros conserve malgré tout la prééminence, ce que manifeste clairement le scénario. La séquence prégénérique ne mentionne pas l’Américain, qui sera introduit après le générique ; plus tard, le Saint conserve une longueur d’avance sur son acolyte texan, affublé d’une personnalité caricaturale, et remplit la fonction de « cheville ouvrière » de la punition des méchants en amorçant seul la bombe qui détruit leur bateau ; c’est lui également qui découvre le stratagème utilisé par le roi pour truquer la partie de cartes, ainsi que les traces de palmes qui conduisent dans l’antre des hommes-grenouilles, lui encore qui place au-dessus de la table de jeu la lampe qui confondra le tricheur, lui toujours qui sauve la jeune fille en détresse. Dans la scène finale, c’est bien le Saint qui se tient près de la demoiselle et qui prend en charge la conclusion, tandis que son acolyte est en retrait. Les deux hommes bénéficient de plusieurs apparitions séparées, ce qui ne sera le cas dans « Premier contact » que dans les quelques séquences liminaires, montées en parallèle, qui précèdent la rencontre. Encore celles-ci sont-elles étroitement liées par le montage parallèle, qui manifeste l’évidence déterministe de la rencontre, et par le teaser, où est annoncée sans équivoque la rencontre déjà planifiée. Le recours à l’écran partagé (split screen) lors de la séquence de la course, dans l’acte I, explicite encore cette organisation bipartite où les deux protagonistes jouent à part égale : de même que tout le générique est construit sur la présentation en parallèle des deux personnages, l’écran partagé rappelle que ces derniers partagent la vedette de l’histoire, nul ne prenant le pas sur l’autre. Ils occupent l’écran en même temps, à égalité ; conclusion de la séquence de la course, les voitures des deux hommes se garent devant le perron de l’hôtel avec une symétrie parfaite.
Tout l’acte I de « Premier contact » est construit autour du rapprochement progressif des deux protagonistes. Montage parallèle d’abord ; écran partagé ensuite ; enfin représentation d’actions parallèles dans un décor unique, avec la séquence de la réception à l’hôtel : Sinclair et Wilde sont reçus séparément mais figurent tous deux dans le même lieu (le hall de l’hôtel) et apparaissent ensemble dans le champ de la caméra, tout en s’ignorant l’un l’autre. Il ne reste plus alors qu’à solenniser la rencontre : c’est le rôle de la séquence du restaurant, et de la scène « culte » du créole crème. Là encore, toutefois, il ne s’agit pas seulement de réunir les deux hommes autour d’un sujet de discorde, mais de jouer, toujours, sur l’opposition et la gémellité : le désaccord porte sur l’ajout d’une ou deux olives au cocktail appelé créole crème. A Sinclair qui demande au barman une olive s’oppose Wilde qui prétend qu’il en faut deux : toute la problématique de la série est résumée dans cette séquence, explicitée d’ailleurs par le dialogue. « Vous n’allez tout de même pas séparer une paire ! » s’écrie Wilde à l’adresse de son acolyte. Montage, dialogues, situations concourent ainsi, durant tout cet acte d’exposition, à créer des effets de reflet : la bagarre qui oppose les deux hommes sera elle-même répétée dans l’épisode, où, au demeurant, les protagonistes n’apparaîtront plus une seule fois séparés. Même la séquence de la piscine, où Wilde se sépare de son encombrant compère pour entreprendre la jeune femme désignée par le juge, n’introduit une distance que pour la nier : Sinclair apparaît dans la profondeur de champ tandis que Wilde occupe le premier plan avec la jeune femme, et toute la scène est observée de bout en bout par le complice demeuré en retrait. Un autre jeu de miroir s’ajoute en outre à la séquence puisque la scène est également observée aux jumelles par deux hommes (encore une paire) depuis l’une des fenêtres de l’hôtel ; dans le plan où Sinclair apparaît en spectateur lointain figure aussi l’observateur aux jumelles. Ajoutons que l’intrigue porte sur la réunion d’un autre couple séparé, celui d’une sœur et de son frère qui portent le nom de Dupont… comme la paire d’inspecteurs pittoresques de Tintin !
Par comparaison, les différences de « Le roi » apparaissent immédiatement : l’acte I, d’une durée équivalente (dix minutes, teaser et générique exclus), n’en consacre que la moitié aux deux protagonistes, le reste allant aux personnages secondaires (le tandem Janine / Pr. Flambeau du côté des gentils, l’autre tandem Roi / Rakosi pour les méchants). Le scénario procède toujours par binômes (2 courtes séquences mettant en présence le roi et Rakosi, 2 autres présentant Janine Flambeau – l’une avec le Saint et Huston, l’autre avec son père -, 2 développant l’antagonisme bon enfant du Saint et de Huston) mais se répartit entre les différents pôles de l’histoire, tous ne se rapportant pas d’emblée au duo vedette. La suite de l’épisode confirme cette répartition tout en concentrant progressivement le récit autour du duo : l’acte II réserve deux minutes au tandem Janine / Pr. Flambeau puis l’acte III resserre l’action autour du Saint et de Huston, reliant les lignes Janine / Flambeau et Templar / Huston ; enfin, l’acte IV conte le dénouement du récit, où Templar et Huston jouent le rôle actif, en réservant encore une ligne au seul Pr. Flambeau, montée en parallèle avec l’action décisive menée par Templar / Huston. Au contraire, l’action des actes II à IV de « Premier contact » reste concentrée sur le duo Sinclair / Wilde, seules quelques séquences, toujours courtes, étant réservées aux méchants de l’histoire. La structure scénaristique confirme donc le projet de chaque série : l’une accorde la primauté à son héros (Templar) mais une partie du découpage reste dévolue aux personnages annexes ; l’autre mise tout sur son tandem vedette, les personnages annexes étant constamment rapportés à celui-ci. Amicalement Vôtre est clairement la série d’un tandem.
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