D’un Starman à l’autre

 

 

IL EST REVENU !

 

C’est sans doute parce qu’il avait produit durant un an la série L’Incroyable Hulk que James Hirsch fut d’emblée attiré par le concept du film Starman, emprunté au genre road-movie. « C’est le fait d’être poursuivi et d’avoir un secret que les gens que vous rencontrez ne connaissent pas », dit-il pour résumer ce qui caractérise le film et dont Le Fugitif est l’expression la plus aboutie à la télévision. Il suffisait de reprendre la trame du film en faisant fi de la fin, comme si l’extraterrestre n’était pas rentré chez lui. C’était là l’idée de Hirsch et de James Henerson, avec qui il venait de produire plusieurs téléfilms dont Le viol de Richard Beck avec Richard Crenna. Tous deux décidèrent de donner à la série un ton plus léger que, par exemple, Le Fugitif, dont le héros Richard Kimble avait peu d’occasions de rire. Il fallait aussi fournir au héros un but à atteindre, condition fondamentale au genre road-movie. Dans le film, le Starman doit rejoindre un endroit précis dans le désert d’Arizona, point d’atterrissage de son astronef qu’il n’avait pu atteindre, intercepté par les chasseurs de l’armée. Un but peu exploitable dans une série car peu susceptible de justifier une errance de plusieurs années : si la série durait, un tel enjeu finirait par devenir ridicule.

La solution était encore dans le film. En quittant la Terre, le Starman laisse à Jenny Hayden un « présent » particulier : un enfant, un petit garçon dont la naissance est d’ores et déjà annoncée. Et si le Starman revenait sur la Terre pour voir son fils ? Il pourrait alors retrouver Jenny Hayden, ce qui permettait de construire la série autour du couple. Comme plus tard le héros de Raven, il rechercherait ensuite son fils, disparu pour une raison qu’il suffisait d’inventer.

L’idée de montrer le père et le fils côte à côte plaisait cependant aux deux hommes, d’autant plus que ce tandem était original pour une série. Ce ne fut donc pas le fils mais la mère qui fut sacrifiée. L’Homme venu des étoiles reviendrait sur Terre pour voir son fils mais il ne retrouverait pas Jenny Hayden qu’il avait aimée. La quête des héros était toute trouvée : le père et le fils rechercheraient ensemble Jenny Hayden, une idée particulièrement adaptée aux années quatre-vingt où l’Amérique fait l’expérience, comme jamais encore, des familles éclatées et de la quête d’identité. Prenant le contrepied des séries familiales fondées sur l’image d’une famille unie avec père, mère et enfants, la nouvelle série pourrait développer au contraire la perte de cette stabilité et une tentative sans cesse renouvelée de la retrouver. La recherche d’un Paradis perdu, en somme.

Pour rendre possible ce concept, Hirsch et Henerson décident de modifier un peu la chronologie. Le film se déroule en 1984, deux ans plus tard le fils du Starman ne peut donc être qu’un bébé. Difficile dans ces conditions de développer une interrelation intéressante entre le père et le fils, sans parler du fait qu’un adulte fuyant à travers le pays avec un gamin de deux ans sur les bras a peu de chances de passer inaperçu et en passant sous silence les difficultés qu’un tel concept poserait aux scénaristes ! Dans la série, la première venue du Starman est donc avancée au début des années soixante-dix, 1972 précisément. En 1986, le fils du Starman aura donc quatorze ans, l’âge où un garçon doit se détacher de l’enfance et regarder vers le monde des adultes.

Au contraire d’une série comme Voyagers, cependant, où le duo formé par l’adulte (Jon-Erik Hexum) et l’enfant (Meeno Peluce) est d’abord un gimmick censé attirer un jeune public (la série, construite sur l’idée du voyage dans le temps, a une vocation éducative et s’adresse en premier lieu à ce public), Starman devait conférer à son tandem une profondeur digne du film. Le premier épisode s’efforce donc d’éviter le piège du « Waou ! Mon père est un extraterrestre ! » pour peindre avec réalisme la rencontre de l’adolescent et de son père.

 

STARMAN, PAS SUPERMAN

 

Fidèles à leur idée de produire une série familiale plutôt qu’une série d’action, Henerson et Hirsch décident également de limiter la part des effets spéciaux. Le film, déjà, n’en fait pas un usage excessif. La série, suivant le même sillon, s’attachera davantage aux personnages qu’aux rebondissements invraisemblables, ce qui offre aussi aux protagonistes un cadre plus réaliste pour évoluer. Le format de la série rend cependant un peu difficile l’utilisation des « sphères » introduites dans le film. Il faudrait au Starman une réserve inépuisable de ces petites boules, dans le cas, toujours possible, où la série durerait plusieurs années. Peu pratique pour voyager. Le Starman de la série conserve donc cet objet indissociable du concept mais désormais la sphère constitue une source permanente d’énergie au lieu de se dissoudre lorsqu’elle est utilisée. Il est également décidé que le pouvoir de ces sphères est en théorie illimité. La « Bible » de la série se garde bien d’en dire plus, de manière à permettre toutes les extensions possibles, mais elle pose tout de même une règle que les producteurs s’attacheront à faire respecter par les scénaristes : le recours aux sphères devra toujours être raisonnable. Pas question de grands chambardements ni de coûteux effets pyrotechniques. Les héros utiliseront leurs pouvoirs pour des choses aussi simples qu’ouvrir une porte ou mettre en marche une machine à moteur, jamais pour arrêter un raz-de-marée ou provoquer un tremblement de terre. Starman ne doit pas être Superman.

De la même manière, et toujours conformément au concept établi par le film, le héros ne sera pas un de ces surhommes qu’il faut se garder de chatouiller sous peine d’être expédié sur la face cachée de la Lune. Dans le film, Jeff Bridges frappe un chasseur en reproduisant exactement le geste de ce dernier sur lui-même, mais il est aussitôt passé à tabac par toute une bande de types venus à la rescousse. Le Starman de la série est du même acabit : il reprendra d’ailleurs cette scène dans un épisode, « Appearances », face cette fois à un camionneur. En revanche, jamais il ne viendra à bout à lui tout seul d’une bande entière, comme pourrait le faire Michael Landon dans Les Routes du Paradis, à moins de recourir aux pouvoirs de la sphère : et encore, il le fera avec modération et humour, dans « The Test », pour venir en aide à son fils Scott (ainsi prénommé à cause du défunt mari de Jenny Hayden dans le film).

 

LES EMPRUNTS

 

La série fera plusieurs emprunts de ce genre au film. Une manière sans doute de lui rendre hommage. Les plans de l’astronef du Starman, par exemple, proviennent tous du film, trop coûteux de toute façon pour la production de la série. C’est aussi pour une raison de coût que la transformation de l’extraterrestre n’est cette fois pas montrée à l’écran. Astucieusement, les scénaristes du pilote (Henerson & Hirsch) ont imaginé que le corps humain du Starman se formait... sous une épaisse couche de neige, ce qui permet de simplement la suggérer en montrant la neige qui se soulève. On ne peut plus économique. D’autant plus que la neige évoque aussi le film, puisque la séquence finale des adieux se déroulait sous une neige artificielle. En revanche, c’est toujours par clonage d’ADN que l’extraterrestre duplique le corps de son hôte.

Comme dans le film également, les sphères luisantes, dont chacun des deux héros possède un exemplaire, ont le pouvoir d’envoyer un message dans l’espace. C’est ainsi que le Starman du film entrait en contact avec son vaisseau-mère, et c’est ainsi que le Starman de la série est prévenu que son fils a besoin de lui. (Bien sûr, les esprits pointilleux noteront que l’enfant a attendu quatorze ans avant d’envoyer un tel message, ce qui est d’autant plus surprenant que ledit message ne procède d’aucune volonté mais est envoyé automatiquement, lorsque l’angoisse de l’enfant se communique à la sphère.)

Robert Hays, C.B. Barnes et Erin Gray : la famille est réunie

Parmi les références explicites, on citera encore la capacité du Starman à changer de chaîne sur un poste de télé simplement en pointant son doigt vers la boîte, le signe qu’il fait à Liz Baynes, pouce levé, comme il l’a appris lors de sa première visite, ou encore la scène du cri reproduite lorsque Liz Baynes se retrouve nez à nez avec le fantôme de Paul Forrester. Dans l’épisode « Dusty », l’influence du héros sur les machines à sous rappelle encore une scène du film où Jeff Bridges trouve ce moyen rapide et pratique d’obtenir de l’argent pour poursuivre son périple. Politiquement correct oblige, cependant, ce n’est plus pour lui qu’il fait cracher les machines à sous mais pour les autres ! Enfin, n’oublions pas au chapitre des emprunts référentiels la casquette rouge que Paul retrouve chez Jenny Hayden dans l’épisode « Starscape » et qui est celle que porte Jeff Bridges dans le film.

 

PREMIER JET

 

On peut mesurer une partie du processus de création de la série en visionnant la fameuse cassette de démonstration qui fut montrée aux journalistes par les dirigeants d’ABC, bien qu’elle n’eût pas été tournée dans ce but. Sur ce court-métrage d’une demi-heure, Paul Forrester ne meurt pas dans un accident d’hélicoptère mais lors d’un incident survenu dans l’espace, alors que le journaliste accompagnait des astronautes dans une mission. Une boule de lumière bleue, identique à la « nature » première du Starman dans le film, avant qu’il ne duplique le corps de Scott Hayden, s’approche du corps flottant dans l’espace à l’intérieur d’un scaphandre et l’utilise comme hôte. Ramené sur la Terre, le journaliste fait figure de miraculé et reçoit les faveurs des journalistes. Un homme, pourtant, trouve dans son comportement quelque sujet d’inquiétude : George Fox, l’agent de la Sécurité Nationale qui quatorze ans plus tôt a traqué avec opiniâtreté un visiteur venu d’outre-espace.

Dans cette version, Jenny Hayden est morte dans l’accident dont Scott a réchappé miraculeusement. Le Starman retrouve son fils simplement en l’attendant à son retour chez lui et lui apprend qu’il est son père. L’adolescent s’enfuit. On le retrouve en prison, d’où son père le fait sortir grâce à la sphère qu’il a apportée avec lui, identique à celle que possède l’enfant et que lui a laissée son père. L’entrée en prison du père est l’occasion d’une scène amusante où il parodie un extrait de L’Inspecteur Harry vu la veille à la télévision. L’évasion permet de donner un aperçu des pouvoirs du bonhomme à grand renfort de lumières pétaradantes et de gerbes d’étincelles, et un chien placé là fort à propos lui donne l’opportunité de démontrer son influence sur les animaux.

Après avoir convaincu son fils qu’il est bien son père et avoir prêté main forte aux pompiers pour venir à bout d’un incendie, le Starman est capturé par George Fox qui veut pratiquer des tests sur lui. Ayant retrouvé sa liberté, il décide d’apprendre à connaître son fils et à se connaître lui-même, en commençant par explorer la vie de Paul Forrester. La suite du document est un montage de situations amusantes ou dramatiques (une explosion extraite du film, Scott apprenant à son père à se raser, la rencontre d’une petite amie de Paul Forrester, une gifle mémorable, un baiser langoureux, le père et le fils perdus dans le brouillard, Fox s’adressant aux bureaucrates de Washington) dont certaines se retrouveront dans des épisodes de la série (« Les meilleurs amis » ou le pilote). Il n’y est pas question de rechercher Jenny Hayden, définitivement morte, mais uniquement d’initiation et de paternité.

Ce n’est donc que plus tard que les producteurs songèrent à faire de Jenny Hayden un enjeu supplémentaire dans la série. On apprendra ainsi dans l’épisode de retrouvailles, « Starscape », que la jeune femme ne cessera d’être poursuivie par Fox après le départ du Starman. Voulant préserver son enfant, elle se résoudra finalement à le confier à une famille d’accueil à Seattle avant de disparaître elle-même. Scott a alors trois ans. Onze ans plus tard, lorsque sa famille d’accueil meurt dans un accident de voiture, lui-même est sauvé par les pouvoirs de sa sphère et ce « miracle » arrive jusqu’aux oreilles de George Fox à Washington. La traque reprend, au moment même où le Starman revient sur Terre, répondant à l’appel inconscient de son fils.

 

PRESS TAPE CREDITS

Executive producers: Michael Douglas, James Henerson, James Hirsch. Director of Development: Deborah Ellis Leoni. Producer, Writer, Director : Mike Gray. Producer, Writer John B. Mason. Associate producer : James Dennett. Secretary to Henerson / Hirsch / Leoni Nina Szedlacsek, Abbe Kanter. Secretary to Gray / Mason / Dennett : Sandy Stockwell. Unit production manager: Larry Albucher. First assistant director : James Dennett. Second assistant director : Gerry Keener. Director of photography : Paul Goldsmith. Film editor : Vincent Sklena. Art Director : Bob Purcell. Stunt coordinator : Hank Baumert. Chief Lighting technician : Scott Spencer. Sound mixer : Victor Goode. Key grip : Bo Miller. Dolly grip : Barry Wexler. Special effects : Robert L. Peterson. Property master : Gaston Gray. Transportation coordinator : Tim Hill. Transportation captain : Jim Barbarino. Script supervisor : Marilyn Giardino. Makeup artists : Jim Scribner, Werner Keppler. Hairstylist : Stephen Elsbree. Location manager : Lou Goldstein. Casting director : Fran F. Bascom. Extra Casting : Central Casting. Construction coordinator : Hank Stonecipher. Set decorator : Ted Lake. Lead man : Larry Haney. Assistant property master : Gene Anderson. Camera operator : George Stephenson. First assistant cameraman : Leslie Otis. Second assistant cameraman : Mark Gridell. Boom operator : Lionel Lavalle. Cableperson : Jack Wolpa. Best boy electrical : Dan Ramirez. Best boy grip : Bob Ivener. Costume designer : Grady Hunt. Costume supervisor : Mary Rose. Set costumers : David McGough, Richard Mahoney. Crafts Service : Allen Shambley. Production office coordinator : Phyllis Hamilton Saldutti. Music editor : Marilyn Davis. Post production V.P.: Christina Friedgen. Editorial supervisor : Ruben Navarro. Looping Coordinator : Teri Christopher. Head Film Librarian : Martin Fox. Columbia TV Music, V.P.: Bodie Chandler. Music coordinator : David Grossman. Publicist : Carla Princi. Caterer : Unique Catering. Special effects coordinator : Rich Thorne. On Line editors: Laurie Kallsen, Barry Cohen. Re-recording mixer : Tamara Johnson. Sound effects : Greg Teall. Video effects programmer : Maury Rosenfeld. Telecine : Howard Sisko. Assistants editors : Vivienne Wraith, Robert D. Black Jr, Eric Notti. Paintbox graphics : Helen Davis, Marcus Drury, Laurel Resnick. Electronic graphics : Mark Perkins. Post production coordinator video Ivan Bernstein, Joe Gareri, Meryl Lippman-Perutz. Emulator : Bill Koepnick. Betacam operator : Gene Einfrank.

Tag(s) : #Dossiers, #Dossiers 1980s
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